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19 Jul

Santa Bárbara beleza pura

Publié par Jean  - Catégories :  #aventure

 

Dialogue avec la Serra de Santa Bárbara


Meus agradecimentos á Secretaría de Meio Ambiente e Turismo do Município de Pontes e Lacerda para ao apoio a viagem de reconhecimento da Serra de Santa Bárbara. Obrigado ao meu companheiro do dia Jovelino pelo carinho com o qual aquela viagem se tounou das mais agradaveis.

 

Santa Barbara 1

Je gardais encore dans ma mémoire sa silhouette incomparable, sa beauté brutalement sensuelle principalement lorsque les derniers rayons de soleil la couvraient d'une coiffe fauve avant de la précipiter dans les ténèbres de la nuit. Nous avions juste eu le temps d'un court dialogue, mais cela avait été suffisant pour en tomber amoureux. Je le confesse, elle m'avait envoûté et je pensais souvent à elle comme si notre rencontre interrompue par une nuit jalouse avait été brisée.

J'avais été un des premiers à la découvrir.

En 1985, une nouvelle piste s'était ouverte sur la frontière bolivienne avec le Mato Grosso. Je m'étais empressé de l'emprunter avant même qu'elle ne soit terminée. Cette nouvelle piste donnait accès à l'un des plus mystérieux reliefs du Mato Grosso, la « Serra de Santa Bárbara » le relief le plus élevé aussi du Mato Grosso. Ses premiers contreforts naissent dans une vaste plaine qui s'étale depuis la Cordillère des Andes. Telle une forteresse, la « Serra de Santa Barbara « s'élève brutalement jusqu'à 1118 m de hauteur.

La nouvelle piste s'ouvrait dans une forêt compacte et ne laissait que peu de champ de vision sur le relief que l'on devinait dans les trouées, monumental et majestueux. Vingt cinq ans plus tard, mes yeux en gardaient encore toute sa beauté sauvage et indomptable.

Je n'étais pas retourné la voir. La proximité de la frontière et tous les trafics qu'elle générait depuis m'avait maintes fois fait renoncer au voyage. Mais le désir de la retrouver, comme une personne avec laquelle j'aurais échangé des moments d'éternité, devint irrésistible; je voulais avoir un nouveau dialogue avec elle, la contempler, me laisser une fois encore envoûter par tous les mystères qu'elle gardait en elle jalousement. Je savais que des fazendas s'étaient implantées à ses pieds, mais le relief lui même avec ses cent cinquante kilomètre d'extention restait inexplorée, vierge, énigmatique et qu'il me faudrait encore attendre pour tenter de pénétrer dans l'une de ses vallées, vers des mondes inconnus.

Pour des motifs de sécurité, j'avais fais un contact avec les autorités locales de la ville de « Pontes e Lacerda » pour négocier une voiture et un « motorista » ( un chauffeur) expérimenté. J'avais analysé des images de satellites, repèré la piste que je voulais suivre et marqué des points GPS. Il ne me restait plus qu'à sauter dans dans un bus et a me préparer à dix heures de route.

Mon bus surnommé « pinga pinga » c'est-à-dire « goutte à goutte » ramasse des passagers en pagaille. Comme il n'y a plus assez de places assises, les gens s'entassent debout dans l'allée centrale avec leur baluchon. Plus nous nous rapprochons de la frontière bolivienne et plus l'influence andine est forte. Nous traversons les territoires des indiens Chiquitanos.

En fin de journée, j'arrive enfin à Pontes e Lacerda. Les autorités locales ont déjà préparé mon voyage. Je fais connaissance avec mon motorista Jovelino. Ensemble nous établissons mon parcours en tenant compte de l'orientation du relief et de la trajectoire du soleil assez basse en cette saison, puisque nous sommes en hiver.

A la première heure du jour, aprés avoir fait une courte halte sur les bord du rio Guaporé un sous-affluent de l'Amazone, nous prenons le cap sud-ouest en direction de la Serra da Borda, une grosse colline allongée à l'infini. Aprés l'avoir franchie, notre piste prend une direction plus au Sud. Sur l'horizon, une masse violacée, c'est la « Serra de Santa Barbara ». Enfin la voici, j'en ai la chair de poule.

Santa Barbara 3 Jean et Jovelino

On roule dans une vaste plaine sans végétation, le forêt a disparu au profit de paturâges investis par des centaines de zébus, tête baissée, et qui paissent sans prêter la moindre attention à la Serra de Santa Barbara dont les premières falaises tranchent sur fond de forêt vierge. Jovelino roule à belle allure, mais j'ai l'amère impression que nous n'avancons pas, j'ai hâte de me rapprocher de la  Serra, de retrouver ses contours harmonieux, d'être enfin certain que c'est bien elle qui se dresse devant mes yeux.

De gros semi-remorques transportant du bétail nous dépassent à toute vitesse en soulevant un nuage de poussière qui assombrit l'atmosphère. Leur passage incessant a déformé la surface de la piste sur des kilomètres. Des miliers de petites vaguelettes tranversales se sont creusées, transformant la surface de la piste en tôle ondulée. Sur ces portions la conduite réquiert une pratique particulière. Ne jamais utiliser le frein, piloter à une vitesse constante et serrer les dents pour ne pas se mordre la langue à chaque secousse brutale. Jovelino s'en sort très bien, malgré son handicap, un seul oeil valide, le gauche.


La Serra de Santa Barbara se rapproche à toute vitesse et nous faisons de fréquents arrêts pour l'explorer avec mes puissantes jumelles. Je la caresse des yeux, découvre des vallées gigantesques, des cascades, des falaises perdues dans le lointain noyées dans une végétation luxuriante. Nous traversons de nombreuses rivières qui naissent là-bas dans l'infini des dernières jungles où j'aimerais tellement m'enfoncer.

Au fur et à mesure que nous longeons Santa Barbara en direction du Sud, la serra s'élève, se morcelle en terrasses. Je peux déjà distinguer sur l'horizon le Morro de Monte Cristo, point final de mon voyage.Les derniers kilomètres sont époustouflants, je ne la quitte pas des yeux. Je voudrais tellement lui parler, m'adresser à elle pour lui dire que parmie tous les reliefs que j'ai photographiés, elle est la plus belle, unique, inoubliable, qu'elle est tout simplement la reine des serras.

Jovelino repère l'entrée d'une ferme qui pénètre un peu dans le relief. Nous tentons de suivre la piste. J'ouvre et ferme une dizaine de barrières, puis la piste quitte la plaine, se tord en lacets, flirte avec les falaises, tutoie les ruisseaux qu'il faut franchir à gué, monte et descend, nous offrant différents panoramas jusqu'à se casser net le nez sur la forêt. La piste ne conduit nulle part. Découragée, elle s'épuise sur un rampart de végétation infranchissable. Tant mieux...

Les heures passent, il ne reste plus qu'une heure de lumière, on fait demi-tour et nous poursuivons encore quelques kilomètres vers le sud, tandis que le soleil termine sa parabole et caresse l'horizon.

Un cavalier vient à notre rencontre intrigué par notre présence. La proximité de la frontière bolivienne favorise le vol de bétail, la vigilance est de mise.

 

Santa Barbara 2

 

Soudain devant moi, le plus beau paysage... La Serra de Santa barbara déploie tout son charme. Je la mitraille ému et intimidé par le panorama... Je n'ai plus rien à dire. Le soleil couchant qui lui fait face la maquille à toute allure de tons ocres rouge orangé. Au fur et à mesure la plaine s'obscurcit, ne laissant qu'un dernier filet pourpre sur ses sommets. J'attends sereinement jusqu'à la dernière minute que la nuit la précipite dans l'obscurité, puis Jovelino et moi la quittons déjà nostalgiques.

Ce fut une journée magique... une serra phénoménale...

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À propos

Jean Périé. Diplômé de Préhistoire à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes. Une vie sur la piste des grottes ornées d'Amazonie, au Mato Grosso,(Brésil). Un inventaire des paysages et de l'Art rupestre témoins d'une occupation vieille de plus de 20 000 ans.