Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
11 Apr

19 Avril, journée nationale de l’indien au Brésil

Publié par Jean  - Catégories :  #population

 

 

C’est bientôt au Brésil la journée nationale « do índio » , vous avez tous traduit « de l’indien ». L’occasion de se questionner sur ce peuple qui 200 siècles avant Christophe Colomb, occupa le continent américain.  Les peintures et les gravures rupestres qui ornent les abris du Mato Grosso au Brésil attestent de cette invasion préhistorique ancienne.

A l’arrivée des Conquistadors espagnols et portugais, le continent sud-américain comptait de nombreuses tribus disséminées sur tout le territoire avec des niveaux culturels très variés. Les indiens de la grande plaine amazonienne restèrent des chasseurs cueilleurs jusqu’à leur découverte par les européens. Compte tenu de leur mode de vie semi nomade, ils ne nous laissèrent que peu de vestiges. Dans la Cordillère des Andes, les riches civilisations incas retranchées dans des forteresses imprenables furent anéanties sans pitié par les Espagnols.

Cinq millions d’indiens divisés en 900 ethnies occupaient le Brésil lorsque les Portugais y débarquèrent en l’an 1500. Les dernières grandes nations indiennes se localisaient au Mato Grosso. Aujourd’hui on ne compte plus que 200 000 individus sur tout le territoire. Avec le déboisement de la forêt amazonienne, leur chance de survie diminue de jour en jour, par la disparition de leur habitat. Combien de tribus restent sans aucun contact avec notre civilisation ? Peut-être quarante dispersées dans les parties les plus difficiles d’accès de la forêt amazonienne, quelque part sur les frontières avec le Pérou et la Colombie.


A l’occasion de cette journée destinée à rappeler à chaque brésilien que les indiens sont leurs ancêtres communs, je voudrais saluer mes deux petits-enfants brésiliens, Patrick et Safira, dont leur sang maternel est indien de pure race. Evoquer les indiens, c’est faire remonter des souvenirs en masse. Les premiers que j’ai rencontrés sont ceux de Guyane Française sur le Haut Itani, puis quelques mois plus tard au Mato Grosso, les Bororos. Leur aide dans mes recherches me fut précieuse et l’amitié qu’ils me portèrent sans limites. Paix à l’âme du vieux chef indien Enrique du village de Jarudore qui me recevait toujours assis sur une natte, les jambes croisées en murmurant une incantation rythmée par des maracas. Dans les années 70, son fils Luis me fit membre de leur clan, celui des «  Meriri-curireu » au cours d’une cérémonie traditionnelle pleine d’émotion.

 Et comment, en ce jour anniversaire, ne pas évoquer les indiens « Lèvre de Bois » dont j’ai partagé la vie durant plusieurs mois sur les rives du rio Arinos. On passait d’heure en heure, des rires à la méfiance. J’éprouve aussi beaucoup de nostalgie pour les moments vécus chez les Indiens géants Kreenakaroré et les Nambikwara de Lévi-Strauss pour qui j’ai offert avec le concours de l’Ambassade de France une école toute neuve dans le village de Tubarão.

En 1987, j’ai tenté de dynamiser un échange entre cette école indienne Nambikwara et une classe française. Hélas nos intermédiaires n’ont pas joué le jeu et le courrier n’a jamais abouti. Ce fut une grande déception.


Le temps a passé et quarante ans se sont déjà écoulés depuis cette expédition de premier contact avec les indiens à plateau. C’était en 1969. Je me pose souvent la question de savoir ce qu’ils sont devenus et l’idée d’aller à leur rencontre avec mes photos à la main me taraude. Retrouver « Beição, Cricri … » bavarder sur cette étonnante rencontre, savoir comment ils l’ont réellement vécu de leur côté, connaître leurs descendants et rire encore ensemble de ces moments si forts, si intenses qui ont mêlé nos vies, nous avions 20 ans… Ah !... Si je pouvais soudainement retourner en arrière, me retrouver là-bas sur les rios Xingu ou Peixoto de Azevedo et m’allonger dans vos hamacs au cœur de la forêt amazonienne pour écouter le son lourd des flûtes géantes ou la pluie tambouriner sur le feuillage… Dommage que la piste des grottes ornées ne croise pas votre chemin. Les blancs vous ont si profondément repoussés dans la profondeur de la forêt tropicale sud-américaine. Ma consolation est que je m’obstine à reconstruire votre histoire et le cheminement de vos ancêtres jusqu’à la forêt amazonienne.

 

Commenter cet article

À propos

Jean Périé. Diplômé de Préhistoire à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes. Une vie sur la piste des grottes ornées d'Amazonie, au Mato Grosso,(Brésil). Un inventaire des paysages et de l'Art rupestre témoins d'une occupation vieille de plus de 20 000 ans.